Ramzy : Journaliste, wouah, quelle chance ! Tu as dû interviewer des stars ! Al Pacino, il a la classe ? Et Jim Carrey ? Et Milos Forman ? Et Brian De Palma ?
Eric : Et Scorsesse ?

Ciné Live: Ce sont vos références ciné ? Pourquoi Pacino ?

Ramzy : Pour toute sa carrière, absolument tout.
Eric : Pas tout, mais je trouve qu'il a un charisme incroyable. C'est pas un des acteurs dont je m'inspire, ça c'est sûr.
Ramzy : Moi si, je fais des trucs comme Pacino, mais c'est difficile dans les grimaces, faut reconnaitre.


C'est quand même pas un grand comique, Pacino...

Eric : Ah non, les références comiques, c'est Mel Brooks !.
Ramzy : Là, on était dans le sérieux, sinon il y a Woody Allen...
Eric : Les Marx Brothers ! Les Marx Brothers ! Leurs gags, c'était n'importe quoi, des rollers qui chaussaient du 60 dans Les grands magasins, tu te souviens, c'était énorme ! Ah la la, Harpo et Groucho...
Ramzy : Groucho, moi, il me tue. Et Harpo, quand il donnait sa jambe aux gens qu'il aimait bien, je l'adorais !
Eric : J'ai appelé mon chien Groucho, je te jure !

Harpo
Groucho
Woody Allen

 

Harold Lloyd (Eric avait raison)

Et Buster Keaton et Charlie Chaplin, alors ?


Eric : Chaplin moins. Il était presque trop social. C'était triste à la fin, j'avais les boules. Non non, c'est les Marx Brothers, le burlesque pur. Et Harold Lloyd, tu te souviens de Harold Lloyd ?
Ramzy : Je le confond avec Buster Keaton.
Eric : Il avait des petites lunettes et un petit chapeau, il faisait des trucs de dingue !
Ramzy : Ca, c'est Buster Keaton.
Eric : Non, c'est Harold Lloyd, sûr, je te parie un sandwich poulet-thon-fromage. Il y a aussi Pierre Richard, Louis de Funès et Jim Carrey.


Ah oui, Jim Carrey ?

Eric : S'il te plait, Dumb and dumber !
Ramzy : Man on the moon ! J'ai hâte qu'il soit à l'image, Jim Carrey, les autres scènes ne m'intéressent pas. Dès qu'il est là, je suis comme un bébé.
Eric : Au-delà des grimaces, tu as vu ce qu'il joue ? Quand même, ça doit être très complice.

 

Bon, tout ça n'explique pas pourquoi le sandwich thon-poulet-fromage et le burlesque.

Eric : Poulet-thon-fromage, je te prie. Le burlesque, c'est parce que c'est ça qui vieillit le mieux. Le gag visuel est intemporel. Alors que les mots, les expressions changent au fil des ans et ne font déjà plus rire cinq ans après. On le voit avec les sketches de nos spectacles, il y en a qui ont vieilli grave ! Ce qui a le mieux résisté au temps, c'est quand on se court après. Donc pour le film, on s'est dit qu'on allait faire un truc qui dure, du visuel quoi.
Ramzy : On voulait aussi faire un film qui plaise aux enfants, comme le film du dimanche soir sur TF1. Tu te rapelles quand on était petits ?
Eric : J'attendais la chèvre, j'étais comme un fou !
Ramzy : J'ai de super souvenirs de ça, c'est le seul moment où j'étais complice avec mes parents.
Eric : J'adorerais pouvoir donner ça aux enfants. Moi, je faisais pas mes devoirs, du coup je les faisais après, mais avec la pêche.
Ramzy : Tu les enregistrais, tu les regardais...
Eric : Mes devoirs, non, je les enregistrais pas.
Ramzy : Moi, on enregistrait mes devoirs sur vidéo.
Eric : Moi, je les envoyais sur internet et pourtant, ça n'existait pas encore, les gens ne les recevaient jamais.

Précurseur, ce n'est pas une science exacte...

Eric : Hé non...
Ramzy : Tu dois être seul, quoi, au sommet.
Eric : Je te jure, je galère. Là, j'essaye de relancer le Minitel.
Ramzy : Les gens n'en veulent plus, du Minitel. Moi, j'essaye de relancer le Bi-Bop.
Eric : J'ai vu qu'ils avaient enlevé beaucoup de bornes.
Ramzy : Il y en a une à côté de chez moi et je me bats pour la garder.

C'est qu'on s'attacherait à ces trucs-là... Au fait, pourquoi ne pas avoir carrément fait une parodie de Piège de Cristal ?

Eric : La parodie a vécu. Malgré le succès de Scary movie, je ne trouve pas ça très nouveau. Il y a eu Y a-t-il un pilote dans l'avion ?, toute la série des ZAZ... Tu laisses Leslie Nielsen dans ce domaine, personne ne le bat. Et puis, c'est peut-être prétencieux de dire ça, mais c'est plus facile d'écrire une parodie qu'un film burlesque. (Il réfléchit.) Non, c'est juste que ce n'est pas notre esprit. Ca ne nous motivais pas. Les parodies ne vieillissent pas très bien.

 

 

 

Pas d'accord !

Ramzy : Moi non plus. Tu peux regarder Top secret ou Y a-t-il un pilote...?, ça fait encore marrer.
Eric : Oui, c'est vrai, donc j'ai dit une connerie, je le reconnais. De toute manière, l'idée est venue du titre, pas l'inverse. C'est Xavier Mathieu qui a trouvé ce titre, La tour Montparnasse infernale. Ca nous a éclatés de rire. Avec Kader Aoun, on a réfléchi à deux ou trois idées. C'est sorti comme ça, vraiment. Après, on s'est dit "ben oui, c'est Piège de cristal", on a pris le sujet et on en a fait une comédie burlesque.
Avouez : que représente pour vous la tour Montparnasse ?

Eric : C'est clair que c'est un symbole phallique.
Ramzy : Ou pas.
Eric : C'est un monument de Paris qui n'a rien à voir avec cette ville. Fallait la mettre à la Défense, qu'est-ce que ça fout là ? Y a rien qui y ressemble autour.
Ramzy : On a dû la faire en cachette, en une nuit, après avoir choisi la plus basique et la moins chère sur le catalogue des tours. Y a dû avoir des magouilles, il faudrait rouvrir le dossier.
Eric : C'est le seul message du film, d'ailleurs : qu'est-ce qu'elle fout là cette tour ? Il n'y a pas de message social.
Ramzy : Oui, c'est notre cri : qui a fait ça ?


Et qui a choisi Charles Nemes comme réalisateur ?

Eric : Ca s'est imposé au fur et à mesure. On réfléchissait à des réalisateurs et on ne voyait pas à quel autre film ressemblait le nôtre. C'était lui ou Soderbergh.
Ramzy : On s'est dit : "Autant prendre quelqu'un avec qui on s'entend bien." Comme on travaille déjà ensemble sur H...
Eric : Il avait un regard vierge, pas d'idées préconçues.
Ramzy : Il est sensible à notre univers.
Eric : Parce qu'on avait un peu honte de certains trucs, il y a quand même le gag de la peau de banane. C'est le plus vieux gag du monde, mais faut l'assumer. Notre confiance en nous est fragile, donc il fallait un mec qui dise : "Mais si, c'est marrant." En plus, Charles, il rendait le truc carré. On reconnait, on est des amateurs, mais on avait la volonté.
Ramzy : On est des artisans, comme tu dis.
Eric : Les monteurs ont eu du mal, parce qu'il n'y avait pas une prise qui ressemblait à l'autre, on ne sait pas encore faire ça.
Ramzy : On n'a pas de formation de comédien, on apprend sur le tas.



C'est pas sympa pour elle, ça.

Ramzy : Attends, on n'a pas dit comment s'appelait le tas... Ce qu'on veut, surtout, c'est être drôles et le plus simplement possible.
Eric : Et le moins mécanique possible. Il fallait qu'on se surprenne l'un l'autre, quand l'un de nous partait sur une petite impro, l'autre suivait.
Ramzy : On se connait bien, donc on sait où on va et dès que ça faiblit, on finit sur ce dont on devait finir.
Eric : Oui, même si la fin de la phrase n'est pas très française.

Comment vous êtes-vous préparés à vos rôles de laveurs de carreaux ?

Ramzy : J'ai passé deux mois en Thaïlande.
Eric : Je me suis lavé pendant deux mois.
Ramzy : A la raclette ?
Eric : A la raclette, absolument.


Suisse ?

Eric : Non, la vraie raclette de laveur de carreaux... Ce sont des personnages qu'on connait bien parce qu'ils viennent de nos spectacles. Sauf que dans nos sketches, le trait est plus prononcé.
Ramzy : On avait mangé avec eux plusieurs fois. Le petit est con, mais le grand a la classe.

Surtout avec son petit short blanc...

Ramzy : T'as vu ça, mes jambes ?
Eric : Tu l'as vue, la comparaison avec Le jeu de la mort ?
Ramzy : Tu sais, la référence sur le combat entre Bruce Lee et le Chinois ?

Mais comment donc ... Euh pas du tout.

Ramzy (incrédule) : J'étais habillé comme Kareem Abdul-Jabbar et personne ne l'a vu ?!
Eric : Apparemment, tout le monde pense que c'est juste une tenue légère que tu aimes.
Ramzy (scandalisé) : Tout le film j'ai cette tenue juste pour cette référence ! Tous les jours sur le tournage, j'étais habillé comme ça, même sous l'armure. Et je me disais : "Mais pourquoi ?" Tout ça pour rien...

 


La référence, c'est pas flagrant, en revanche la grenouillère jaune du Chinois, on la voit bien !

Eric : C'est vrai qu'il est habillé comme un bébé, il ne manque que le bavoir !
Ramzy : La première tenue était encore plus Babygro, on l'a retaillé, on pensait que c'était mieux et en fait, non alors ?
Eric : Oh, et puis zut, c'est un film comique.

Oui, la preuve, il y a le célèbre comique Joey Starr dans un cameo...

Eric : Mais c'est un mec marrant dans la vie, vraiment.
Ramzy : Avec lui je rigole.
Eric : On lui a donné une image, les médias en ont fait un tabasseur de femmes, tout a été interprété.
Ramzy : Le pire c'est que même quand il est tranquille chez lui, les keufs débarquent pour une perquisition. Là, il est en prison parce que la policeest venue chez lui, comme ça, et après avoir tout retourné, elle a trouvé de l'herbe.

C'est de sa faute : il joue de cette image !

Eric : Oui, il la cultive. Mais il est intelligent et drôle, je te jure. Avec toutes les embrouilles qu'il a eu, il aurait pu mal le prendre qu'on lui propose de jouer un flic. Mais non, pas du tout. Il a accepté tout de suite. C'est un mec que je respecte et dont je respecte la musique.
Ramzy : Il fait partie des rares dans ce métier qui ne font pas les choses pour de l'argent. J'espère qu'on aura la même longévité que lui dans le métier, et la même authenticité.

Vous vous sentez proches de Joey Starr ?!

Eric : Oui, parce que c'est un artiste authentique, qu'il ne pense pas au fric mais à se faire plaisir. On n'a pas pensé aux entrées en faisant ce film, par exemple. On voulait juste faire quelque chose qui nous faisait marrer et qui ne soit pas dans l'esprit de "H".
Ramzy : Quitte à faire des choses qui n'amusent personne sur le plateau. C'est là qu'on explosait de rire et qu'on gardait la scène.
Eric : Il y a eu des silences, oh la la ! J'ai surpris des regards entre techniciens... Il faut dire qu'on faisait les imbéciles et que parfois on allait très loin dans la bêtise. Ca peut être très mal pris, ça, du genre "c'est lamentable". Et il y a des scènes lamentables qu'on a coupées. Il a fallu qu'on se cherche... et je ne sais pas si on s'est trouvés, d'ailleurs.
Ramzy : C'était notre premier film, on était impressionnés.

Eric : Heureusement, on savait quand on allait trop loin. On a tenté des choses finaudes, subtiles même. Normalement, sur une scène, tu as une réponse immédiate, là, sur le tournage, on n'en avait aucune idée.

C'était un calvaire, pour vous, de jouer sans public ?

Eric : Non, finalement, c'était plutôt une chance. On s'est demandé si on partait dans le mur au début, et puis on a décidé de se faire confiance mutuellement.
Ramzy : Tant qu'on se faisait rire l'un l'autre, tout allait bien. Et on est fiers de notre film.



Mais ce n'est pas avec ça que vous serez considérés comme des acteurs par la profession, vous le savez ?

Eric : Je sais que peu importe notre expérience ciné ou télé, on n'est pas pris au sérieux et on ne nous respecte pas dans la profession. Jamel est vachement plus respecté parce qu'il y a un message social dans ce qu'il fait, du coup çà l'ennoblit. Nous, ce qu'on fait, c'est se marrer pour se marrer.
Ramzy : Ca n'a pas trop d'intérêt si tu regardes bien, il n'y a pas de message.
Eric : Et on est super snobés.
Ramzy : Le seul qui nous ait considérés comme des acteurs, c'est Christian Fechner (producteur du film). On se rapelle de producteurs qu'on croisait, qui allaient voir les autres et se contentaient de nous saluer de loin. Fechner, lui, est venu assister à nos spectacles en province. Et il nous a laissé faire, même si ce n'était pas son univers.

Ca vous ennuie, de ne pas être respectés ?

Ramzy : Honnêtement, au début, c'était blessant, on ne comprenait pas pourquoi.
Eric : Maintenant, ça nous réconforte, ça veut dire qu'on est différents des autres.
Ramzy : On a eu peur de ne jamais faire partie du milieu du cinéma, mais ça ne nous a pas empêchés de faire notre film. Si on est à part, tant pis, du moment qu'on fait marrer les gens.
Eric : Mais ça a été dur parce qu'on n'avait pas vraiment confiance en nous.

Qu'est-ce qui vous a pris de vous lancer dans le cinéma ?

Eric : La scène, "H", tout ça c'était devenu une routine. Les succès étaient garantis, entre guillemets. Les saisons de "H" cartonnent, en tournée on joue devant trois mille personnes... Le cinéma, c'était un vrai risque.

Vous vous considérez comme des acteurs, maintenant ?

Ramzy : Non.
Eric : Attends, on joue dans un film quand même !
Ramzy : Oui, mais c'est au service de la blague. Un acteur est au service du rôle, nous c'est tout pour l'humour. Plus on peut glisser, tomber, se cogner, baver, plus on est heureux. Un acteur, ça se pose parfois.
Eric : Non, l'idée c'est de faire croire à un personnage, c'est ce qu'on fait.
Ramzy : C'est pareil et... c'est pas pareil.

De toute manière, là vous n'êtes que des comiques. Dans le cinéma français, pour être considéré comme un acteur il faut jouer dans des mélodrames effroyables, tuer des gens, enterrer sa femme, violer son caniche...

Eric : On s'en fout. On n'aspire pas à ça, c'est trop génial de faire rire. Chacun doit faire ce qu'il sait faire. Et les caniches, c'est pas mon type. Le rire, ce n'est pas n'importe quoi ! Un soir, une femme est venue me trouver pour me remercier. Elle était avec une amie qui avait perdu son mari quatre mois avant et elle m'a dit que c'était la première fois qu'elle la voyait rire en quatre mois. C'est extraordinaire ! J'en suis très fier et je me fiche que ce soit un lieu commun.


C'est affreux, vous n'aurez jamais le César du Meilleur acteur...

Ramzy : Tant qu'ils nous invitent pour remettre des prix... Mais le jour où il feront le César du plus rigolo, j'aimerais bien l'avoir.
Eric : Eh, tu sais que tu me fais marrer aujourd'hui !
Ramzy : Bon alors ferme-la. Ce sera encore mieux.
Eric : C'est vrai en plus.
Ramzy : Tais-toi pour voir.
Eric : ...
Ramzy : On est bien là, non ?

 

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